Les nombreuses catastrophes naturelles qui ont eu lieu cet Ă©tĂ© remettent en question le fonctionnement du secteur de lâassurance habitation. Entre les incendies qui ont ravagĂ© le sud de lâEurope et les inondations qui ont frappĂ© la Belgique et l'Allemagne, les dĂ©gĂąts se chiffrent en milliards dâeuros. Qui va payer ? Est-ce aux assureurs de dĂ©dommager lâentiĂšretĂ© des dommages ? Quel va sera lâimpact de ces catastrophes de plus en plus frĂ©quentes sur lâĂ©volution des tarifs dâassurance durant les 20 prochaines annĂ©es ?
La question climatique est dĂ©batue en ce moment Ă Glasgow. MĂȘme si les Etats s'engagent Ă diminuer leurs Ă©missions, il est trop tard pour empĂȘcher les catastrophe climatique d'ĂȘtre de plus en plus frĂ©quentes. Selon le dernier rapport du GIEC dâaoĂ»t dernier, cela ne fait aucun doute : les catastrophes climatiques seront de plus en plus rĂ©guliĂšres et violentes sur lâensemble de la planĂšte. Les 30 derniĂšres annĂ©es, le coĂ»t des sinistres climatiques a dĂ©jĂ triplĂ© et selon les prĂ©visions, ce coĂ»t va encore augmenter.
Selon lâĂ©tude internationale du rĂ©assureur Swiss Re, lâassurance des biens immobiliers est le secteur assurantiel qui connaĂźtra la plus forte croissance dans les 20 prochaines annĂ©es. Ils estiment que la somme de lâensemble des primes devraient quasiment tripler pour grimper Ă 1.300 milliards de dollars dâici 2040, contre 450 milliards en 2020. Cette hausse sâexplique par le changement climatique, mais aussi lâurbanisation croissante qui nĂ©cessite dâassurer davantage dâhabitations et dâinfrastructures telles que les aĂ©roports, gares ou rĂ©seaux dâeau et dâĂ©lectricitĂ©. Lâassurance va devenir plus risquĂ©e et plus complexe car les coĂ»ts des catastrophes naturelles sont plus difficiles Ă prĂ©voir.
En Belgique, 97% des biens sont assurĂ©s pour une valeur de 6,5 milliards d'euros. Lâassurance habitation nâest pas lĂ©galement obligatoire, mais elle est exigĂ©e par les banques lorsquâun prĂȘt hypothĂ©caire est souscrit ainsi que lorsque le bien est mis en location. On peut donc sâattendre Ă voir la valeur totale du secteur tripler, mais quâen est-il de la prime individuelle de chaque consommateur ?
Les primes sont calculĂ©es en fonction des statistiques de risque. Au plus le risque est important, au plus la prime dâassurance annuelle est Ă©levĂ©e. Câest ainsi que les primes dâassurances auto des jeunes conducteurs sont jusquâĂ trois fois plus Ă©levĂ©es que celles des conducteurs expĂ©rimentĂ©s. Le mĂȘme principe est-il appliquĂ© aux assurances habitation ? Si câest le cas, les habitants des communes touchĂ©es par les inondations vont-ils voir leurs primes doubler lâannĂ©e prochaine ? Câest ce que nous allons voir dans les points suivants.
Pour ne pas rendre impayable lâassurance de certains biens, le principe du risque mutualisĂ© est appliquĂ© Ă la part "Catnat" des assurances habitation. Le risque de catastrophe naturelle est partagĂ© parmi lâensemble des primes dâassurance. Cela Ă©vite que les biens les plus exposĂ©s aux risques voient leurs primes doubler suite aux inondations. Les hausses de prime suite aux inondations seront donc rĂ©parties sur lâensemble des assurĂ©s. Lâassureur a cependant le droit de refuser de couvrir les personnes qui dĂ©cident de construire dĂ©libĂ©rĂ©ment en zone inondable.
On ne sâattend pas Ă une hausse majeure directe suite aux inondations de juillet dernier. Lors des inondations qui ont frappĂ© la Belgique en juillet 2016, aucune augmentation majeure nâa Ă©tĂ© observĂ©e. Les compagnies ont des bons matelas financiers qui leur permettent de tenir le coup. De plus, il y a une intervention des autoritĂ©s publiques pour les gros risques tels que les inondations. Pour les inondations de juillet, on estime les dĂ©gĂąts entre 1,3 et 1,7 milliard dâeuros. Les compagnies dâassurances rembourseront 590 millions dâeuros et les pouvoirs publics sâengagent Ă financer la somme restante. Ă plus long terme, les risques de catastrophes naturelles croissant, le secteur des assurances demande une rĂ©vision des lĂ©gislations encadrant lâintervention des pouvoirs publics. Si les assureurs veulent continuer Ă indemniser les assurĂ©s de maniĂšre correcte sans trop augmenter les primes annuelles et tout en ne mettant pas en pĂ©ril leur solvabilitĂ©, il faut davantage dâintervention des pouvoirs publics.
MalgrĂ© lâespoir dâintervention croissante des pouvoirs publics, une augmentation de 2% des primes dâassurance habitation est attendue dans les deux prochaines annĂ©es. Dâune part, il y a lâaugmentation naturelle due Ă lâindexation des primes dâassurance. Cet index, appelĂ© ABEX est calculĂ© sur base des coĂ»ts de la construction (matiĂšres premiĂšres et main dâĆuvre). Dâautre part, il y a tout de mĂȘme une lĂ©gĂšre hausse pour anticiper lâaugmentation des risques de catastrophes naturelles.
En conclusion, les tarifs des assurances habitation devraient lĂ©gĂšrement augmenter dans les annĂ©es Ă venir. Cette hausse sera modĂ©rĂ©e dans un premier temps par lâintervention des pouvoirs publics. De plus, les rĂ©assureurs disposent de solides rĂ©serves. En revanche, sur une Ă©chelle de 20 ans, des solutions devront ĂȘtre trouvĂ©es face Ă lâaugmentation des risques de catastrophes naturelles pour limiter lâimpact sur les primes dâassurance des consommateurs.